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Mon blog-notes (et celui d'Abysse)
11 octobre 2014

Alors que les Alsaciens manifestent contre toute fusion... Réforme territoriale : entre gâchis et risque de balkanisation.

Entre 6.500 et 30.000 manifestants (selon la police ou selon les organisateurs, comme le veut la formule) ont dit "non" ce samedi à Strasbourg au projet de fusion de la région Alsace avec la Lorraine et avec la Champagne-Ardenne.

Mon ancien confrère de L'Union de Reims, Alain Moyat, a réagi vertement sur Twitter : "#outretombe Les Poilus champardennais disent encore merci à l'Alsace-Lorraine. Ils sont morts pour rien. A la revoyure..." Bien qu'ardennais par mon père, et lorrain (je suis d'ailleurs né à Metz) par ma mère, je serai plus modéré. N'empêche, voilà qui m'interpelle.

"On ne mélange pas le Riesling avec le Champagne" avait écrit un manifestant sur sa pancarte, au sein d'un cortège d'autant plus étoffé que la droite locale et le patronat alsacien avaient appelé à se joindre à cette poussée d'urticaire tout sauf spontanée.

La vérité est sans doute ailleurs. Si l'on ne mélange pas les vins de terroirs différents, sans doute une partie de ces manifestants a surtout peur de se diluer dans une grande région que la Champagne-Ardenne tirerait vers le bas. Déjà divisés entre eux (on sait les antagonismes entre Bas et Haut-Rhin), les Alsaciens se situent dans la moyenne supérieure des régions actuelles, en terme de revenus, de création de richesse, profitant de surcroît du voisinage avec l'Allemagne et la Suisse. Alors, si certains accepteraient bon gré mal gré un rapprochement avec la Lorraine (et surtout la Moselle), pas question en revanche de se marier avec les pauvres métallos d'Ardenne et les bonnetiers aubois. Sans parler du désert du Plateau de Langres ! Tant pis pour les clichés !

Sur ce, à l'heure où crise aidant, les velléités indépendantistes sont au plus haut partout en Europe (Ecosse, Catalogne, Flandre etc.), et pas seulement pour faire perdurer une langue et des traditions (car la tentation est grande de se replier sur soi par gros temps, surtout si l'on dispose de ressources que les voisins n'ont pas), on ne peut conclure que la réforme territoriale initiée en France tourne au gâchis. Et on reste poli.

Question de méthode, évidemment. Comment convaincre quand un découpage est opéré dans le secret des cabinets ministériels ou entre deux séances à l'Assemblée ? Déjà malmenées à la Révolution (qui raya de la carte nombre d'entre elles, de l'Artois au Quercy en passant par le Dauphiné), les provinces françaises créées sous la Ve République pour former de nouvelles régions avaient quelque unité pour certaines (Nord-Pas de Calais, Alsace, justement, ou encore Auvergne), mais semblaient déjà bien hétéroclites ou hétérogènes pour d'autres (le Centre, par exemple). Alors, même si l'intention était louable, vouloir former des territoires plus vastes, plus forts, tout en espérant d'éventuelles économies, cette réforme a vite tourné au salmigondis (expression chère à feu Raymond Barre).

Et non seulement on ne demande leur avis aux élus de base que par politesse, mais le peuple, lui, est gentiment prié de regarder passer le train de la modernité supposée sans crier... gare. Allez vous étonner donc, au final, que tout cela finisse par avoir des relents de potentielle balkanisation. Alors qu'on souhaite encourager les fusions, on tend ou en tout cas on risque de tendre à l'éclatement, au retour de revendications vaguement identitaires, fondées ou non. C'est pourquoi d'ailleurs en Bretagne, on a évité de joindre la Loire-Atlantique. Ou que l'on se méfie d'une région basque ou catalane (française).

Je me demande si le mieux, pour les Champardennais, rejetés tant par les Picards que par les Alsaciens, ne serait pas de se tourner vers le Grand Paris. Ou la Wallonie ! Non ?

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